Une vidéo montre le meurtre sur commande allégué d’un leader sikh en C.-B.
Hardeep Singh Nijjar devant le temple Guru Nanak Sikh Gurdwara de Surrey, avant sa mort, en 2019. (Photo d'archives)
Photo : (Ben Nelms/CBC)
Une vidéo de sécurité obtenue par l’émission de CBC News The Fifth Estate montre que le meurtre du leader séparatiste sikh Hardeep Singh Nijjar, militant pour la création du Khalistan, était une opération hautement coordonnée.
Le 18 juin 2023, Hardeep Singh Nijjar a été tué alors qu’il quittait le temple sikh qu’il dirigeait à Surrey, dans le Grand Vancouver.
La vidéo obtenue par The Fifth Estate a été vérifiée de façon indépendante par plusieurs sources.
En septembre, le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, a dénoncé le rôle potentiel du gouvernement indien dans le meurtre du président du temple Guru Nanak Sikh Gurdwara en sol canadien. Cette déclaration a eu pour effet de détériorer les relations diplomatiques entre Ottawa et New Delhi.
Dans la vidéo de sécurité, Hardeep Singh Nijjar quitte le stationnement du temple dans sa camionnette Dodge Ram. Alors qu’il s'approche de la sortie, une berline blanche s’arrête juste devant lui, bloquant son véhicule. Deux hommes arrivent et tirent sur le séparatiste sikh avant de prendre la fuite.
L’émission « The Fifth Estate » de CBC montre les moments avant la mort du militant sikh canadien Hardeep Singh Nijjar.
Photo : Fournie par l'émission The Fifth Estate
Deux hommes, qui jouaient au soccer sur un terrain à proximité de là, ont été témoins de la scène et ont entendu les coups de feu. Nous avons vu deux hommes courir
, a dit Bhupinderjit Singh Sidhu, l’un d’entre eux, à The Fifth Estate. Nous nous sommes précipités vers l’endroit d’où le son provenait.
Bhupinderjit Singh Sidhu a demandé à son ami Malkit Singh de rattraper les deux hommes tandis qu’il aidait Hardeep Singh Nijjar.
Malkit Singh les a poursuivis jusqu’à ce qu’ils disparaissent dans une deuxième voiture, une Toyota Camry couleur argent. Une voiture est arrivée depuis l’allée et ils y sont rentrés. Il y avait trois autres personnes dans la voiture
, a-t-il affirmé.
On pouvait sentir la fumée des pistolets, l’odeur des pistolets était présente partout.
Six hommes et deux véhicules ont participé à l’attaque coordonnée, d’après The Fifth Estate.
Près de neuf mois plus tard, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) n’a toujours pas donné de noms de suspects ni effectué d’arrestations dans le dossier.
Soupçons de meurtre commandité
En septembre, toutefois, Justin Trudeau a émis des soupçons sur l’implication de l’Inde dans le meurtre de Hardeep Singh Nijjar, des allégations vivement démenties par New Delhi.
Après des mois de tensions diplomatiques liées au meurtre d’Hardeep Singh Nijjar, l’ancienne conseillère à la sécurité nationale et au renseignement du gouvernement Trudeau, Jody Thomas, a finalement affirmé que le Canada travaillait à rétablir une relation plus saine
avec l’Inde, en janvier dernier.
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Pendant des mois, les médias indiens ont remis en question les allégations de Justin Trudeau et lui ont demandé des preuves.
Ce n'est qu'en novembre que des preuves ont été exposées, mais à New York, lorsque le département de la Justice américaine a rendu publique une mise en accusation, révélant les détails d’un complot déjoué pour le meurtre d’un autre sikh de citoyenneté américaine et canadienne.
Le nationaliste indien Nikhil Gupta est accusé d’avoir tenté de planifier le meurtre d’un avocat de New York à la demande d’un employé du gouvernement indien dont le nom n’a pas été divulgué.
Aucune des accusations n'a été prouvée en cour.
D’après la mise en accusation, le complot a été déjoué lorsque Nikhil Gupta a pris contact avec un informateur anonyme de la police américaine, par erreur. L’homme a été arrêté en République tchèque, en juin 2023. Il fait face à des accusations de conspiration pour meurtre et attend d’être extradé aux États-Unis.
L’acte d’accusation révèle également des allégations selon lesquelles, New Delhi planifiait au moins trois autres assassinats au Canada en juin dernier.
Le document allègue que, quelques heures après le meurtre de Hardeep Singh Nijjar, le 18 juin, Nikhil Gupta a envoyé une vidéo de son corps à la personne qu’il essayait d’engager comme tueur à gages, en lui indiquant de tuer rapidement
la cible new-yorkaise.
Le combat pour un Khalistan indépendant
Cette cible en sol américain s’est par la suite révélée être Gurpatwant Singh Pannun, un fervent allié de Hardeep Singh Nijjar dans le combat pour la création du Khalistan, un état indépendant qui comprendrait notamment le Pendjab, une région à majorité sikhe partagée entre l’Inde et le Pakistan.
Le gouvernement indien considère ce mouvement comme une menace à la sécurité et, en 2020, a qualifié de terroristes de nombreux leaders pro-Khalistan, dont Hardeep Singh Nijjar et Gurpatwant Singh Pannun.
Dans les dernières années, Gurpatwant Singh Pannun a organisé des référendums non contraignants partout dans le monde pour sonder l’adhésion des sikhs à la création d’un État du Khalistan.
Des dizaines de milliers de sikhs y ont participé à Londres, à Melbourne, à Rome, à Genève et aussi au Canada, notamment à Brampton et à Mississauga, en Ontario, et à Surrey, dans le Grand Vancouver.
Gurpatwant Singh Pannun croit que Hardeep Singh Nijjar et li sont devenus des cibles du gouvernement indien à cause de ces référendums.
Les deux hommes ne seraient toutefois pas les seules cibles dans la communauté sikhe canadienne.
The Fifth Estate a rencontré cinq hommes de Surrey qui disent avoir reçu des avis d'obligation d'alerter
de la GRC. Ces mises en garde signifient que la police soupçonne qu’ils sont des cibles possibles et que leur vie est gravement menacée.
D’autres complots au Canada?
Les multiples avis d'obligation d'alerter des autorités et la présence de trois cibles
alléguées dans le document juridique américain soulèvent des doutes sur d’autres meurtres de sikhs commandités au Canada, potentiellement orchestrés par le gouvernement indien.
Il pourrait y en avoir d’autres
, a affirmé Ward Elcock, l’ancien directeur du Service canadien du renseignement de sécurité, à l’émission Power and Politics, de CBC News, le 29 novembre 2023.
En juillet 2022, Ripudaman Singh Malik, 72 ans, a été tué par balle à Surrey, en Colombie-Britannique, d'une manière semblable au meurtre de Hardeep Singh Nijjar.
Moninder Singh, porte-parole pour le Conseil des Gurdwaras de la Colombie-Britannique, croit que les deux décès sont liés, parce que. selon lui, Ripudaman Singh Malik aurait été victime d'un meurtre commandité par l'Inde.
Lui-même avait reçu une mise en garde pour sa sécurité en juillet 2022, peu après le meurtre, dans le Grand Vancouver, de Ripudaman Singh Malik, un des accusés de l'attentat d'Air India, l’attaque terroriste la plus meurtrière du Canada.
Par ailleurs, un personnage controversé, Ripudaman Singh Malik, avait été acquitté en mars 2005. Il a été tué alors qu’il était dans sa Tesla rouge, à côté de son travail.
Comme dans le cas de Hardeep Singh Nijjar, la police estime que deux suspects ont pris part au meurtre avant de s’échapper dans un véhicule.
Le procès des deux hommes arrêtés et accusés d’avoir eu un lien dans la mort de Ripudaman Singh Malik aura lieu en octobre.
Avec les informations de The Fifth Estate
